Interview: Marjane Satrapi
Propos recueillis par Caroline Planque
Posted
January 21,
2008
Vous avez aimé sa bande dessinée, Persepolis; vous
apprécierez d’autant plus son film d’animation, qui relate
l’histoire de sa vie, portée à l’écran par les voix de Chiara
Mastroianni, Catherine Deneuve et Danielle Darrieux. Enfant,
adolescente ou adulte, en noir et blanc ou en chair et en os,
Marjane Satrapi reste étonnement fidèle à elle-même et n’a
certainement pas la langue dans sa poche. A vous de juger !
Votre style de dessin, assez stylisé : l’avez-vous développé
spécialement pour cette BD, ou bien est-ce votre manière
naturelle de dessiner ?
M.S. : Dans la bande dessinée, le dessin fait partie de la
narration. Ce n’est pas de l’illustration. Ce qu’on n’écrit pas,
on le dessine. Comme les histoires que je raconte sont assez
compliquées, avec beaucoup de mots, il faut alléger sur le
dessin pour que cela ne devienne pas redondant. Je pense que
cela se fait naturellement. Et puis, je n’aime pas trop les
fioritures de façon générale.
Noir et blanc plutôt que couleur : un choix artistique, ou bien
un souci de facilité, ou de rapidité ?
M.S. : Je viens de la bande dessinée indépendante, dans
laquelle, dès le début, pour des raisons économiques, on publie
en noir et blanc parce que cela coûte moins cher. Ensuite, c’est
une question d’esthétique aussi. Et même si j’avais la
possibilité de publier en couleur, je ne le ferais pas. J’aime
beaucoup le dessin en noir et blanc. Pour les histoires que je
raconte, la couleur ne ramène rien, finalement. Pour moi, ces
dessins-là suffisent en noir et blanc. Evidemment, quand je fais
des livres pour enfants, ou si je fais une affiche, je mets de
la couleur. Je ne suis pas contre la couleur, mais pour la
narration, ainsi que pour l’esthétique, je trouve que le noir et
blanc fonctionne mieux.
Comment êtes-vous devenue illustratrice ?
M.S. : Vous savez, j’ai dessiné toute ma vie ; et puis, j’ai
fait des écoles d’art aussi. C’est mon métier, mais ce n’est pas
comme si, à un moment donné, on allait dessiner. Soit on a
dessiné toute sa vie, soit on n’a pas dessiné. Moi, je fais
partie de ces gens qui n’ont pas arrêté de dessiner à l’âge de
dix ans. La plupart des gens arrêtent de dessiner à l’âge de dix
ans. C’est bien pour cela aussi qu’on a toujours des problèmes
avec les bandes dessinées, les dessins animés, parce que pour
tous ces 99% des gens qui arrêtent de dessiner à l’âge de 10
ans, le dessin appartient aux enfants de moins de dix ans. Le
système éducatif n’aide pas non plus. On nous apprend très, très
vite à parler d’une œuvre écrite, mais on ne sait pas du tout
comment approcher le dessin. Qu’est ce qu’un bon dessin ou un
mauvais dessin ? N’ayant pas les outils pour pouvoir le juger,
on le rejette aussi beaucoup plus facilement.
Est-ce que vous avez été inspirée par d’autres dessinateurs ?
Quelles sont vos références ?
M.S. : Dire que mon inspiration vient de la bande dessinée
serait faux, car je n’étais pas une lectrice de bande dessinée
du tout. J’ai eu des bandes dessinées, mais pour moi, il n’y a
pas de frontières entre différentes façons de s’exprimer, entre
différents arts. Dire que je n’ai aucune influence est faux
aussi, car je ne suis pas sortie de moi-même. J’ai vu des
choses, mais mes influences peuvent venir autant de la
littérature que du cinéma, la peinture, des gravures, et même de
la musique. Je suis influencée par tout ce que je vois, tout ce
que j’entends, tout ce qui me touche, tout ce que j’aime. C’est
une influence beaucoup plus générale.
Comme on le voit dans votre film, vous avez vécu des événements
très particuliers. Quel a été l’instant le plus décisif de votre
vie?
M.S. : Il n’y a eu que des instants décisifs. Dans ma vie, comme
dans celle de tous les gens, on est toujours devant des
dilemmes, on fait toujours des choix, malgré tout. Vous savez,
on peut toujours dire non. Donc oui, à chaque fois que j’ai été
face à un dilemme, tous ces instants-là étaient des moments très
importants. Mais je pense que c’est propre à la vie de toute
personne. Je pense qu’il n’y a pas de vie plus plate que
d’autre, des souffrances supérieures à d’autres. Je ne mets pas
d’échelle de valeur là- dedans. C’est certainement pour cela que
je peux vivre ailleurs et avoir des amis qui viennent de
partout, car je ne suis pas condescendante avec les souffrances
et les histoires des autres. Penser que l’on a le monopole de la
souffrance, c’est très chiant, surtout, et très inconscient. Ce
n’est pas parce qu’on vous a coupé un doigt et qu’on m’a coupé
un bras que vous souffrez moins que moi. C’est la même
souffrance. Il n’y a pas d’échelle là-dedans. Pour moi, le
courage est le courage de la vie de tous les jours et les choix
sont les choix de la vie de tous les jours.
Comment avez-vous vécu votre intégration en France? Plus facile
qu’en Autriche, différente ?
M.S. : En Autriche, ce n’était pas une question de l’Autriche ou
pas. J’étais adolescente. L’adolescence est un âge absolument
incongru. Truffaut disait : « Les gens qui ont un bon souvenir
de l’adolescence sont des gens qui ont une très mauvaise
mémoire ! » Je suis vraiment de cet avis-là. Vous vous
imaginez : j’étais adolescente, loin de ma famille, j’étais dans
un lycée très, très bourgeois, le lycée français de Vienne, en
plus, il y avait la guerre chez moi. Tous ces éléments-là
faisaient que ce n’était pas facile. Ce n’était pas une question
de l’Autriche ou d’ailleurs. J’aurais été en France, ça se
serait très mal passé aussi. Concernant l’intégration, je ne
crois pas au choc des cultures, car les cultures sont liées
comme les maillons d’une chaîne. En fait, la question de
l‘intégration est une question de pauvreté et une question
économique. Quand vous avez quelqu’un comme moi qui vient d’une
classe moyenne plutôt aisée, qui a eu la chance de faire ses
études dans une école bilingue, qui a voyagé toute sa vie, qui
a eu accès aux livres, aux films, et cetera… évidement il n’y a
aucun problème pour moi quand j’arrive dans un nouvel endroit
car, culturellement, je suis préparée. J’ai une connaissance qui
me permet de communiquer avec les gens tout de suite. C’est très
différent quand vous venez d’une immigration où vous avez des
ouvriers qui ne savent rien à rien, qui ne parlent pas la
langue. Donc, ce n’est pas un choc des cultures, mais un choc de
classes sociales. Cela s’arrête là ! C’est aussi pour cela que
moi, je n’ai jamais eu de problèmes d’intégration. Quand les
gens me disent : vous êtes l’exemple imparfait de l’intégration,
je leur réponds : moi, je n’ai jamais dû m’intégrer, je savais
tout cela, je suis la même personne. Je change comme je
changerais n’importe où. Le problème est quand vous n’avez pas
de fric, que vous êtes obligés de vous mettre en bordure des
villes, que vous n’avez pas l’accès à l’éducation, donc vous
n’apprenez pas les langues, donc vous n’avez rien finalement à
partager avec les gens. C’est là où il y a vraiment une
fracture, mais cette fracture est surtout économique.
L’intégration est un sujet très délicat en France, beaucoup plus
qu’aux Etats-Unis, par exemple. D’après vous, pourquoi les
immigrés se fondent-ils beaucoup plus facilement dans la société
américaine, alors que la France doit faire face à beaucoup de
problèmes identitaires ?
M.S. : Aux Etats-Unis, ils ont une culture de l’étranger, car
ils sont tous étrangers. Donc évidemment, c’est beaucoup plus
facile quand vous arrivez, parce que déjà, on ne vous juge pas.
En France, on a l’impression qu’on est tous des héritiers de
Voltaire et de Montesquieu… en beaucoup plus réactionnaire !
Moi, cela fait deux ans que j’ai un passeport français. Je parle
français couramment, je travaille en France, j’écris en
français, mais les gens ont du mal à me considérer comme une
Française, parce que, vous comprenez, je ne suis pas vraiment
française. Alors qu’ici, vous pouvez venir à 20 ans et à 40 ans,
vous pouvez être au parlement américain, parce que vous avez la
nationalité américaine. C’est un pays qui est basé sur
l’étranger, donc pour que ce pays se construise, on peut devenir
américain. Mais ne devient pas français qui le veut ; il faut le
mériter. En Allemagne, c’est encore pire : on le mérite par le
sang. En Europe, il y a cette reconnaissance de l’histoire.
C’est quelque chose qui me frappe beaucoup. Aux Etats-Unis, par
exemple, je ne dis pas qu’ils ne font pas des conneries, mais,
s’ils font la guerre du Vietnam, ils sont les premiers à faire
des films sur la guerre du Vietnam. Ca ne les empêche pas de
recommencer, mais ils font le mea culpa. En France, le film
La Bataille d’Alger a été montré pour la première fois à la
télévision il y a trois ou quatre ans, sur Arte, à onze heures
du soir ! Encore aujourd’hui, beaucoup de gens refusent de
reconnaître qu’on a inventé la torture moderne en Algérie. Donc
comme on ne le reconnaît pas, il est beaucoup plus difficile
pour autrui aussi de faire les démarches pour venir dans ce
sens, parce qu’il n’y a aucune reconnaissance. Le fait de le
reconnaître, c’est déjà pas mal. Même si on répète les
conneries, on dit à l’autre : écoute, on sait qu’on t’a fait du
mal. En Europe, on dit par exemple : oui, ces Américains, ils
sont venus et ont tué tous les Indiens… Mais je leur réponds :
les mecs qui ont tué les Indiens, c’était vous, les Européens
qui se sont par la suite déclarés Américains. Ils ne sont pas
venus de la planète Mars, c’est vous !!! Mais ils ne veulent
même pas reconnaître cela ! A part l’Allemagne, je ne connais
aucun pays européen qui a fait son mea culpa avec la seconde
guerre mondiale. En France, si vous écoutez les Français, ils
étaient tous résistants ! La collaboration ? Non, on ne l’a pas
faite ! Mais si, vous l’avez faite, et il faut l’accepter et
continuer. Mais pour les victimes, qu’au moins les gens qui lui
ont fait subir cela acceptent qu’ils l’ont fait, c’est déjà
bien. C’est même déjà beaucoup. Ici, il y a d’autres problèmes.
Je ne vais pas faire de prosélytisme sur les Etats-Unis non
plus ! Quand je travaille aux Etats-Unis, même si je n’y vis
pas, j’ai l’impression de faire partie de la société. En France,
je suis bien, car j’ai beaucoup d’amis, mais c’est seulement une
fois que la France a choisi mon film pour le représenter aux
Oscars que, pour la première fois, je me suis sentie Française.
Avant cela, je pouvais me sentir Parisienne. Avec mes amis,
j’étais la copine de mes amis. Mais Française, jamais… Mais là,
je me suis dit : oui, peut-être que je suis réellement
Française. Et maintenant, je le dis, mais cela a pris du temps.
Que pensez-vous de l’actualité en France et des dernières
élections ?
M.S. : Pendant 8 ans, on s’est foutu de la gueule des Etats-Unis
avec George Bush, des Italiens avec Berlusconi, des Anglais avec
Blair et des Espagnols avec Aznar. Quand les Espagnols se sont
débarrassés d’Aznar, les Italiens de Berlusconi, les Anglais de
Blair, les Américains de Bush, nous, on a élu Sarkozy. Il y a
84% de taux de participation et 54% des gens qui ont voté pour
lui. C’est beaucoup. Il n’y a pas eu une abstention de 50%. Non,
tout le monde a participe et ils l’ont élu ! Les gens que je
connais et qui ont voté pour lui me disent : regarde, le Front
National a reculé. Mais à partir du moment où l’on crée le
ministère de l’immigration et de l’identité nationale, Le Pen a
gagné ! Le Pen en personne, on s’en fout, mais ses idées
prennent de l’avance. A partir du moment où on se donne un
chiffre pour le nombre de gens que l’on doit mettre à la porte
chaque année… ce sont des idées de l’extrême droite, qui ont été
digérées et intégrées dans cette nouvelle droite.
Quelle est votre position sur la question du voile en France ?
Pourquoi est-ce un tel problème en France, et pas en Turquie,
par exemple, où les filles ne se cachent pas le visage à
l’école ?
M.S. : Pour moi, c’est un non-problème. On m’a obligée à porter
le voile, donc je n’aime pas le porter. Mais puisqu’on m’a
obligée à porter le voile, je ne peux pas obliger quelqu’un à ne
pas le porter. Pour moi, c’est la même violation des droits de
l’homme, les gens devraient pouvoir faire ce qu’ils ont envie de
faire. Le problème commence quand vous avez une pensée et que
vous imposez aux autres de le faire. Si vous êtes d’une certaine
manière et que vous dites : tout le monde doit être de cette
même manière, là, je ne peux pas admettre. Mais si quelqu’un,
pour lui-même, a envie de faire telle chose et ne vient pas
emmerder le monde… je m’en fiche.
En tant qu’immigrée, pensez-vous qu’il faille s’adapter aux eus
et coutumes du pays d’accueil, ou bien attendre du pays
d’accueil qu’il accepte toutes les coutumes étrangères, même
lorsqu’elles vont à l’encontre de celles du pays d’accueil (par
exemple, le port du voile, de la kippa, la polygamie, etc.) ?
M.S. : La polygamie est un problème social. C’est la structure
de la famille qui est mise en question. Ce n’est plus une
croyance personnelle. En même temps, en France, il y a beaucoup
de polygamie, car les gens trompent beaucoup leurs maris et
leurs femmes… c’est de la polygamie officieuse. Moi, je n’ai pas
de réponse à ces questions. La seule chose que je sais, c’est
que les pauvres petites filles qui sont déjà punies une fois par
leurs familles qui les obligent à porter le voile, sont punies
une deuxième fois parce qu’on ne les laisse pas aller à l’école,
alors que si on veut que ces filles ne portent plus le voile, la
seule façon de faire est de le émanciper par l’éducation. Si
vous empêchez une fille de 16 ans, que sa famille oblige à
porter le voile, d’aller à l’école, qu’on la marie à 16 ans et
demi avec son cousin, à 20 ans, elle a quatre gosses et elle n’a
plus aucune chance, jamais, de s’émanciper ! Car les garçons
qui traitent ces filles-là de putes, eux, sont toujours sur les
bancs de l’école. Car eux n’ont pas de code vestimentaire, donc
ils peuvent continuer. A chaque fois que le gouvernement veut
parler aux musulmans, il ne peut pas avoir à chaque fois comme
interlocuteur les imams des mosquées et à la fois interdire aux
filles de porter le voile. C’est un double discours. Après, il y
a les libertés personnelles, les lois à l’intérieur d’un pays,
les droits de la famille, et cetera. Moi, la question que je me
pose est : est-ce vraiment une solution ? La loi sur le voile
est devenue un symbole de révolution dans certains quartiers…
Quand il y a eu la loi sur le voile, il y avait 700 cas en
France, le même nombre depuis 1994… Le nombre n’avait pas
augmenté, mais il fallait faire du bruit. C’est loin d’être une
généralité. Il y a un truc qui arrive et tout le monde ne
regarde que ce truc-là. C’est comme pour l’Iran. On voit cette
réalité officielle. Je ne dis pas que cette réalité n’existe
pas, mais il y a tout le reste qu’on ne veut pas voir. Donc on
fait des monstres. Ce n’est pas aussi important qu’on le pense.
Et puis, il faut aussi se poser la question, dans un pays comme
la France : comment se fait-il que la mère de ces filles ne se
voilait pas dans les années 70 alors que ses filles veulent,
elles, se voiler ? Je ne suis pas politicienne, historienne ou
sociologue, je n’ai pas de réponse à donner. Je pose simplement
la question. Pourquoi se voilent-elles ? Peut-être parce
qu’elles ont une crise d’identité, qu’elles ne sont pas prises
en considération, car elles ne sont chez elles ni en France ni
dans leur pays d’origine… donc, peut-être qu’elles se trouvent
une identité dans le port du voile. Et peut-être que pour
combattre cela, il faut les respecter et leur donner une
identité…
Mais hélas, le monde est scindé de plus en plus en deux.
M.S. : Oui, et les extrémistes sont de partout, d’un coté comme
de l’autre. Mais je pense qu’on ne peut pas combattre le
fanatisme avec le fanatisme, la stupidité avec la stupidité, la
violence avec la violence. Cela ne marche pas et il faut avoir
d’autres armes.
Que représente pour vous la sortie de votre film aux U.S. dans
le contexte actuel où Bush menace d’attaquer l’Iran ?
Pensez-vous qu’il permettra de véhiculer une autre image du
peuple iranien ?
M.S. : Considérer qu’autrui est un humain, comme eux. Ce n’est
pas une autre image de l’Iran, mais juste la considération de
l’humain. Je n’ai pas plus de prétention que cela : juste se
demander ce qu’est un individu… Plus que cela n’est vraiment pas
mon devoir, je suis une artiste, c’est tout.
Votre film fait la part belle aux femmes, pensez-vous que ce
soit elles qui arriveront à véhiculer un changement positif dans
la société ?
M.S. : Je suis contre la culture machiste. Ce n’est pas les
femmes que je préfère. Et malheureusement, dans la culture
machiste, ce sont elles qui transmettent les valeurs et élèvent
les enfants. Celle qui dit à son fils : tu es différent de ta
sœur, c’est la femme. Celle qui apprend à son fils à se
comporter mal avec sa femme, c’est la mère. Je n’aime pas les
femmes machistes, ni les hommes machistes. Et les femmes qui
pensent que l’homme et la femme sont pareils, je les aime, et
les hommes pas machistes, je les aime aussi. Pour moi, s’il y a
un monde de demain, il se fera avec des gens pas énervés, qui ne
sont pas dans la vengeance, qui ont de la tolérance et qui sont
non machistes et non patriarches. Mais des femmes patriarches,
cela existe aussi. J’ai toujours travaillé dans des milieux très
masculins, que ce soit la bande dessinée ou le film, j’ai
toujours eu beaucoup de collègues hommes et ils ont toujours été
parfaits avec moi. Cela n’a jamais été un souci. C’est pour cela
aussi que je ne me suis jamais déclarée féministe. Je n’aime pas
la connerie et c’est tout ! Qu’elle vienne de l’Est ou de
l’Ouest, ou des hommes, ou des femmes, ou des musulmans ou des
chrétiens ! Je pense que le meilleur concept qui ait jamais été
créé dans le monde est le concept de l’humanisme, qui a illuminé
tout le XVIIIème siècle, que l’on a appelé le siècle des
lumières. Peut-être que pour lutter contre l’obscurantisme
actuel, il faut retourner vers cette valeur humaniste du
XVIIIème siècle. Mais on parle de tout sauf de l’humain. C’est
pour cela aussi que dans mon film, je place une personne au
centre d’intérêt. Il faut dénoncer la connerie. Si on dit que
l’axe du mal existe, et que le mal, c’est ces gens-là, vous
savez, on peut retourner en 1939. Le début du fascisme est là.
Si on commence à donner un nom et une adresse au mal, à partir
de ce moment, on le détruit et nous, les honnêtes gens, allons
vivre entre nous. Sauf que cela ne se passe pas comme ça. Le
fanatique est international, le connard est international et le
mec intelligent est international. Et c’est bien plus compliqué
que ça. Et c’est cela qu’il faut voir. C’est compliqué. Et c’est
tout ce que j’essaye de montrer avec mon film. Au lieu
d’apporter des réponses, j’essaye de poser des questions du
style : si c’était vous, qu’auriez-vous fait ? Quand on accuse
les gens de quelque chose, trouvons l’équivalent de cela chez
nous.
Persepolis starts Friday, January 25 at the
Harvard Exit Theatre
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